Depuis 2019, France Assos Santé Nouvelle-Aquitaine s’est engagé sur le sujet de la douleur et de la souffrance. Un groupe de travail rassemblant les acteurs associatifs du réseau s’est mis en place afin de donner de la visibilité à cet enjeu de santé publique. Pour cela, il a mené des actions de sensibilisation et de plaidoyer auprès du réseau néo aquitain.
Dans le cadre de la journée mondiale de la douleur, les membres de notre groupe de travail se sont exprimés autour de la prise en charge de la douleur en soulevant les freins et les leviers à une bonne politique de santé sur la question. Ils ont aussi tenu à s’exprimer en partageant leurs expériences et en confiant leur regard quant aux perspectives.
Prise en charge de la douleur : des progrès restent à faire
Si la France est loin d’être le plus mauvais élève en matière de prévention et de prise en charge de la douleur, selon le groupe de travail de la délégation, « des améliorations méritent d‘être apportées » :
Sylvie, bénévole active au sein de l’association Famille Rurale Gironde nous dit : « Il est possible que la prise en charge de la douleur ait un peu progressé, mais on a encore du chemin à faire. La récente crise sanitaire avait provoqué une régression de la prise en compte de la douleur, cette dernière étant jugée alors moins urgente que les autres soins ». La personne douloureuse est en proie à ses douleurs, et risque de se sentir isolée et non prise en compte.
Caroline, bénévole au sein de l’association Les liens du cœur regrette que « la prise en charge physique et psychique de la douleur demeure un parcours d’étapes, semé d’embuches et de lassitude ».
Si ce parcours concerne bien évidemment avant tout la personne douloureuse, il n’en demeure pas moins complexe pour l’entourage et le proche-aidant qui accompagne le patient douloureux.
Pour le groupe de Travail la prise en charge de la douleur requiert de prendre en compte TOUS les acteurs principaux ou le triptyque professionnels de soins + proche-aidant + personne douloureuse, dans un contexte d’écoute et de réciprocité mutuelle.
Pour Caroline « bien souvent la personne souffrant de douleurs chroniques et diffuses, est en attente d’échanges et d’écoute, plus que d’un accueil ou d’un discourt sur la définition de la douleur ou de l’attente d’un jugement ; (…) Le patient a besoin d’une prise en soins personnalisée, dans laquelle il puisse être un acteur à part entière, avec toute la marge d’actions et de manœuvres qui soit la sienne. Elle poursuit en indiquant qu’« il faut dorénavant convenir de façon collective à ce que la prise en charge puisse s’articuler autour d’approches thérapeutiques complémentaires et pluridisciplinaires, et qui soient concertantes »
Fabienne, de l’association France Spondyloarthrites déclare également en ce sens que « des progrès ont été faits dans la connaissance de la douleur, sa perception, ses mécanismes de prise en charge. Ces progrès ont permis une meilleure évaluation pour mieux prendre en compte l’individualité du patient, collaborer avec lui pour lui permettre de traduire son ressenti à l’aide d’outils d’auto-évaluation et l’aider à quantifier et qualifier l’intensité de sa douleur.
Quelles améliorations apporter ?
A l’hôpital comme à la ville, la prise en charge et la prise en soins de la douleur doit pouvoir se faire de façon continue, en mettant en place tous les moyens de façon la plus novatrice possible et la démocratique possible.
Le réseau associatif et les représentants des usagers ont un véritable rôle à jouer dans la réflexion des recommandations mais aussi sur le terrain de façon concrète. La sensibilisation, l’information et le plaidoyer sur la défense et la protection des droits sont les déterminants de l’action associative de demain.
Ainsi, pour Sylvie « En tant que RU, je participe aux CLUD (comité de lutte de la douleur) dans un établissement de Gironde et au CHU de Bordeaux. Le CLUD est une instance qui a pour mission d’améliorer la prise en charge de la douleur, les orientations les mieux adaptées à la situation locale et qui, dans l’idéal, doivent figurer dans le projet médical d’établissement (article L.710-3–1 du Code de la Santé Publique) ; Le CLUD du CHU de Bordeaux a mis en place des Groupes de Travail. Je fais partie de celui sur la formation et celui sur les thérapies non-médicamenteuses ».Les représentants des usagers ont donc une place à jouer et les instances tel que le CLD ont un véritable rôle à jouer en établissement, même si ils sont loin d’être les Seuls leviers possible.
Fabienne poursuit et affirme à ce propos que :« beaucoup reste à faire comme le renforcement de la formation des professionnels de santé, notamment des médecins généralistes, former des patients experts, identifier et mieux définir les parcours de santé, sensibiliser les professionnels de santé et le grand public, rechercher les mécanismes à l’origine des différentes douleurs, améliorer les traitements, et permettre un accès précoce aux thérapeutiques non médicamenteuses »
Par ailleurs Le groupe de travail recommande vivement de renforcer la formation initiale et continue des professionnels et la présence des patients experts dans ces formations, et dans les parcours de soins. Comme le souligne Sylvie L’un des freins qui perdure est celui des formations initiales et continues insuffisantes en quantité et en qualité, pour les médecins et les autres professionnels de santé. Il y a une vraie urgence à mettre en place des formations à déceler et appréhender la douleur, mais aussi des formations pour la traiter avec tous les moyens médicamenteux et autres à disposition ». D’ailleurs les anecdotes de vie relatives à la prise en soins par des médecines intégratives ou complémentaires sont de plus en plus rapportées en termes de bénéfice et de qualité de vie du patient.
Pour Henriette, adhérente à la Ligue Contre le Cancer de la Dordogne (24) « la reconnaissance de la douleur comme spécialité médicale est une urgence. Ainsi l’algologie ou la médecine de la douleur souffre d’un maillage géographique insuffisant et très Hospitalo-centré. Les moyens alloués à la question et à la mise en place d’un réseau adapté sont malheureusement insuffisants. L’organisation en structure spécialisée pâtie de ces manques et il est difficile d’avoir un rendez-vous dans un centre antidouleur »
Sonia, Chargée de mission pour France Assos Santé Nouvelle Aquitaine, complète « il est regrettable qu’en dehors de l’hôpital, les médecins de ville aient des compétences insuffisantes en matière d’évaluation et d’accompagnement à la douleur. Les retours d’expériences que nous avons quant aux douleurs post-opératoires à la sortie des établissements, sont parfois très négatifs et pointent du doigt des défaillances en matière de prise en charge en ville par le médecins traitant ou spécialiste, avec des patients qui nous racontent souffrir et se sentir bien démunis une fois rentrés chez eux ; L’algologie doit pouvoir se développer en ville au même titre que la formation des praticiens dans ces mêmes zones ».
Les actions :
France Assos Santé Nouvelle-Aquitaine mène des actions depuis bientôt 4 ans sur le sujet de la douleur. Webinaires, Communiqués de presse, outils-support pour les personnes douloureuses, les acteurs associatifs et les représentants des usagers, flyers etc. constituent les matériaux dont nous disposons pour œuvrer sur la problématique de la douleur et de sa souffrance. Le travail sur le terrain permet non seulement d’aider à la reconnaissance de l’usager-douloureux mais également à porter la voix de ceux et celles qui ont besoin d’être entendus dans leur vécu et leur besoin, tout en défendant leurs droits aussi lorsqu’ils ne peuvent plus les faire valoir.
Sur ce dernier point Henriette du groupe de travail déclare qu’ « il y a aussi des familles qui ne veulent pas que l’on calme leur malade en fin de vie, ils veulent que le malade reste conscient jusqu’à la fin! D’où l’intérêt d’avoir rédiger les directives anticipées, mais certains ont peur de les écrire ou ne savent pas comment les rédiger ». L’accompagnement par les associations et les représentants des usagers est alors essentiel sur la question des directives anticipées. En Nouvelle Aquitaine les RU et la délégation France Assos Santé mène depuis plus de 2 ans un travail de fond autour de la question des directives anticipées dans le cadre de la fin de vie.
C’est évidemment par un travail d’information et de sensibilisation que France Assos Santé Nouvelle-Aquitaine et son groupe de travail sur la douleur envisagent les actions concrètes en matière de douleur. Ces dynamiques doivent être adaptées au vécu de la douleur par les personnes qui l’éprouvent. C’est d’ailleurs en ce sens que s’est investie L’association France Spondyloarthrites. Fabienne présente l’outil créé en direction du public douloureux et accompagnant « Nous avons également créé une plateforme dédiée « payemadouleur » en 2022, d’abord destinée aux enfants de 3 à 18 ans, elle sera désormais active pour les adultes le 16 octobre 2023. Totalement gratuite et à destination de toutes les pathologies, elle permet également d’inclure son traitement afin de suivre l’évolution de la douleur au quotidien, sur une semaine, un mois, trois mois. Le but étant de pouvoir en discuter en consultation avec son médecin ou autres professionnels de santé. Les professionnels de santé peuvent également s’inscrire sur cette plateforme. Nous espérons à l’avenir pouvoir l’améliorer d’autres fonctionnalités pratiques pour les malades et professionnels de santé »
Par ailleurs, le groupe de travail de la délégation néoquitaine travaille depuis bientôt 3 ans à l’élaboration d’un outil pratique qui puisse aider la personne douloureuse à oser parler de ses douleurs et de ses souffrances. Il s ‘agit d’un outil à partager avec ses proches-aidants. Ce travail est en cours de relecture et devrait voir le jour en 2024 !
Le groupe de travail reste attentif et vigilant aux évolutions actuelles en matière de douleur. Il reste aussi à l’écoute de tout acteur qu’il soit une association, un représentant des usagers ou simplement un usager du système de santé. C’est parce que vous nous ferez vos retours que nous porterons en suivant votre voix et la défendrons.
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